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Un gilet en peau de zouzou
29 mars 2011

Marcel Rufo, mon amour. Episode 3 : Un morceau d'anthologie, les coliques

Vous êtes toujours jeune parent. Ceci n'est pas toujours pas une remarque sur votre âge, ou sur le fait que votre parentalité réveille votre capacité d'émerveillement. Ceci est une manière de situer le récit qui va suivre.

Votre zouzou a, disons, autour de trois semaines. A chaque âge suffit sa peine, et là, votre peine, c'est que votre zouzou pleure, non, hurle, depuis quelques jours. Tous les soirs, tous les jours. Si vous avez eu de la chance, vous avez coulé des jours tranquilles au retour de la maternité et la vie n'était que jeux et ris, ou plutôt manger et dormir, au rythme du zouzou - vous aviez alors un teint de rose et vos amis vous demandaient si vous ne reveniez pas de thalasso : "Georges et Bella étaient parfaitement heureux, ils passaient leur journée à se lancer zagazou..." - (il faut que je fasse une note sur Zagazou, de Quentin Blake). Mais là, le ciel s'est couvert, et vous avez découvert les "pleurs du soirs". Zouzou-zagazou s'est transformé en petit vautour, et ses cris sont terrifiants ("La nuit, ses cris étaient encore plus terrifiants").

Si vous avez de la chance, ces soirées hurlantes ne dureront pas. Si elles durent, vous vous accrocherez à votre Grandsenne-zouzou-bréviaire qui vous jure que ça s'arrête après trois mois.

En attendant, les quarts d'heures de pleurs sont comme des heures, et parfois ça dure des heures, qui sont comme des jours (enfin pas tout à fait, mais comment ça s'arrête ?). Vous essayez tout, le bercer, le promener, le laisser, le mettre sur le ventre, sur le dos, la tête en bas (enfin quand même pas). Vous faites collection des méthodes locales éprouvées - en variant le ton, par exemple tenez : Classique : "j'ai connu un zouzou qui ne se calmait que dans le porte-zouzou. Les parents le gardaient en porte-zouzou /en écharpe élégamment nouée toute la soirée". Randonneur : "... que dans sa poussette. Ses parents lui faisaient faire des tours du pâté de maison". Peu écologique "... qu'en voiture. Et les parents de rouler, de rouler". Original : "... que sur la machine à laver. Heureusement, il y en avait, à faire tourner !" etc. etc. etc.

Certains soirs, ça marche, d'autres pas. Au milieu des crises, comme de toute façon, vous ne pouvez rien faire d'autre, vous le bercez d'un bras et vous consultez les livres à votre disposition de l'autre (Comment ça s'arrête ?).

Allez, tiens, y a-t-il quelque chose dans le Marcel Rufo, Christine Schilte, Elever bébé - édition 2011 ?

Alors : heure du loup, immaturité du système nerveux, colique, problèmes de la relation mère-enfant ? Votre problème n'est pas ici théorique (pour un premier aperçu de la jungle des doctrines, voir ici), mais TRES pratico-pratique (Mais comment ça s'arrête ???). Il a mal, vous avez mal, vous voudriez le soulager, vous voudriez qu'il s'arrête, vous voudriez pouvoir-savoir l'apaiser, vous voudriez pouvoir aller dormir.

La page sur les coliques (p.145) est un morceau d'anthologie, je pourrais la recopier en entier. Elle laisse ouvert le grand champ de bataille des doctrines ("des interprétations diverses"), entre somatico (les "problèmes intestinaux" - que sembleraient accréditer les "gaz" mentionnés quelques lignes plus haut dans la description des crises) et psy (le bébé "exprimerait une difficulté de relation avec son entourage" ou "trouble psychique de sa mère"). Enfin, apparemment ouvert (usage du conditionnel, opposition des "uns" et des "autres"), car la balance penche plutôt en faveur du psycho, le somatico n'ayant droit qu'à une ligne au passé ("on a d'abord pensé à des problèmes intestinaux") le psy ayant droit à plusieurs ("Aujourd'hui, la 'thèse à la mode' est celle d'un trouble psychologique") - quoique ! Ce pourrait être la faute du lait maternel (encore la mère !).

Bref, vous tournez en rond et en bourrique. Et vous êtes coincéE, votre énervement n'est-il pas cela même qui le fait pleurer ? Et cela va beaucoup vous aider pour le soulager ici et maintenant, c'est peut-être dû à la manière dont la mère allait pendant sa grossesse, les pleurs pouvant être "la manifestation différée d'une souffrance maternelle au cours de la grossesse".

Alors que faire ?

Le paragraphe suivant continue de s'embrouiller entre somatique et psy - ok, colique n'est pas diarrhée, et les selles peuvent continuer d'être "tout à fait normales", pour autant si la colique "provoque une violente douleur abdominale", peut-on affirmer que cela "n'a rien à voir avec des troubles intestinaux" ? Cela tendrait à reléguer définitivement dans le passé la thèse des "problèmes intestinaux", mais quid alors de l'hypothèse mentionnée à la fin du paragraphe précédent sur le "lait maternel" qui "riche en lactose, favoriserait ces coliques, surtout en début de chaque tétée, car il n'est pas toujours intégralement absorbé par l'intestin et provoquerait ainsi des fermentations".

De plus, les solutions proposées sont plutôt somatico-truc : bouillotte, massage doux du ventre, tisane... mais attention, il ne faut pas se méprendre, puisqu'elles sont synthétisées par la phrase "Le traitement est avant tout relationnel" - il est vrai que les "gestes qui calment" devaient s'accompagner de "beaucoup de tendresse et de disponibilité".

Tout cela serait plutôt gentil : on vous présente la diversité des théories (bon, avec de vrais morceaux de "problèmes de la relation mère-enfant" dedans, mais quand même, ils font des efforts), on vous soumet une série de petits trucs qui peuvent faciliter la vie et améliorer les choses, tout en vous remettant la capacité de  soulager votre enfant : "A vous de trouver ce qui lui convient le mieux (...)". Et le paragraphe se conclut sur une note toute grandsennienne "Quelle que soit la cause de ce trouble, on constate qu'il disparaît, comme par enchantement, à la fin du 3è mois."

Mais là, l'apothéose finale.

Le passage "A vous de trouver ce qui lui convient le mieux (...)" continuait ainsi : " le confort de vos bras étant le plus souvent le meilleur remède à ses pleurs intempestifs" - à défaut de pouvoir toujours le soulager, allez-y, prenez le dans vos bras, disponibilité et tendresse ?

Caramba, encore raté.

Dans une police un peu plus grand à la fin de la page, cette phrase mise en exergue, entre guillemets :

"Ne vous laissez pas piéger par un bébé qui a compris comment convaincre ses parents de le prendre dans leurs bras et qui tire ainsi des bénéfices d'une manifestation de douleur."

Ainsi naît le zouzou manipulateur : Attention ! il pourrait tirer des bénéfices de votre tendresse...

Ailleurs, cela pourrait s'appeler des injonctions contradictoires.

 

 

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Commentaires
Z
Il suffisait (presque) de demander...<br /> (Je dis presque, pasqu'en fait, si j'avois pas prévu d'écrire ce soir, pas sûre que le sommeil ne l'eût pas emporté sur mon plaisir de répondre à une si gentille demande)<br /> <br /> (Et, oh, plaisir de trouver un commentaire qui ne soit pas "I really favor in your blog!The great masterpiece with nice and informative post and topic that move me and enlarged my eyeline quite a lot.Thanks for sharing with us.Best regards!<br /> If you wanna seek fashion,welcome to my online store etc. etc. etc.")
A
On veut des nouvelles notes
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